Chef d’escadron Patrice SONZOGNI


Depuis fin novembre 2008, le capitaine SONZOGNI, sous les ordres du LCL SMAGGHE, commandant en second du régiment, faisait partie d’un OMLT Appui pour la formation de l’armée afghane.

Ce 11 février 2009, il avait pour mission d’accompagner une unité afghane pour la reconnaissance d’une zone sensible et de prendre contact avec les autorités locales dans cette province du Logar à une trentaine de kilomètres au sud de Kaboul la capitale. Après avoir pris contact avec le chef d’un village, son unité est repartie pour poursuivre sa mission de reconnaissance. Quelques centaines de mètres après la sortie de ce village, après le passage du premier véhicule afghan le convoi a été stoppé par l’explosion d’un engin explosif improvisé (IED) sous le VBL du CNE SONZOGNI donnant le signal du déclanchement d’une embuscade avec des armes d’infanterie. Immédiatement, une équipe d’appui aérien du régiment, en fin de colonne, a fait appel à l’aviation et deux avions d’appui A 10 et un hélicoptère d’attaque Apache américains sont intervenus dans les minutes qui suivaient permettant de mettre fin à l’embuscade.

Malheureusement, le Capitaine SONZOGNI et son interprète afghan étaient tués sur le coup alors que le conducteur, le BCH RODRIGUES était très grièvement blessé.

Vers midi, heure de Tarbes, la nouvelle a commencé a filtré et ce fut un choc terrible pour le régiment et tous ses anciens. Le capitaine SONZOGNI était et restera la figure du régiment, jeune sous-officier chef de pièce, jeune commando parachutiste, jeune lieutenant chef d’équipe commando, commandant d’unité exemplaire, officier renseignement, il avait effectué pas moins de 19 missions à travers le monde, en Afrique, en Irak, dans les Balkans soit plus de 6 années à braver les dangers en ayant déjà été grièvement blessé au fort d’Al Salman lors de l’invasion de l’Irak en 1991. Cet homme sorti du rang, parfaitement intégré, bien dans sa peau était unanimement reconnu et apprécié de tous, subordonnés, pairs et supérieurs.

C’est pourquoi cet homme, le plus décoré au régiment, si estimé de tous, était la figure exemplaire du régiment à qui il ne pouvait rien arriver. Un coup de massue terrible à l’annonce de cette nouvelle dramatique pour tous mais surtout pour son épouse et ses deux filles.

Le corps du capitaine SONZOGNI est rentré en Métropole dans la nuit du vendredi 13 au samedi 14 février. Il a rejoint la chapelle ardente préparée en salle “Leguen” le dimanche en fin de matinée et à été constamment veillé par des personnels du régiment. À partir de ce moment, de manière continue pendant deux jours, tous ses amis, civils et militaires, connus ou inconnus sont venus se recueillir et lui rendre hommage.

La cérémonie officielle ayant été fixée au mardi 17 à 16 H 00, le régiment et l’amicale se sont mobilisés pour préparer les cérémonies, militaire et religieuse, et informer un maximum d’amis et d’anciens. La mobilisation a été totale et dès 13 H 30, le régiment et les anciens étaient en place pour accueillir un flot ininterrompu d’officiers, de sous-officiers de parachutistes, d’anciens du 35 et de toutes les unités parachutistes, les présidents d’associations et leurs drapeaux, le GCA BENITO, président de la Fédération Nationale des Associations Parachutistes, le GCA BARDON, président d’honneur de la Fédération Nationale de l’Artillerie et bon nombre d’amis civils et tarbais pour rentrer dans le quartier Soult afin de rendre un dernier hommage militaire à leur ami et frère d’armes.

À 15 H 45, le dispositif militaire du régiment est en place avec un peloton d’honneur du 1er RHP et des commandos parachutistes de la brigade, une quarantaine de drapeaux d’associations patriotiques entourent le monument aux morts et plus de 2000 amis et anciens bouclent le “U”, une foule impressionnante rarement vue au quartier.

La cérémonie débute par la présentation des troupes au chef de corps. Le colonel PELLERIN accueille l’Étendard et lui fait rendre les honneurs avant d’accueillir 7 anciens chefs de corps – GAR FAUGERE, ZELLER, GDI COAT, L’HUILLIER, COL DE GESTAS, NICAISE et DELION.

À 16 H 00, le chef de corps accueille le Ministre de la Défense et les autorités civiles et militaires – M. DELAGE, préfet des HP, M. TREMEGE, maire de Tarbes, M. GLAVANY et Mme RODRIGO, députés des HP, le GAR IRASTORZA, CEMAT, le GCA CLEMENT-BOLLEE, COMRTSO et le GAL BOSSER, COM 11ème BP – qui vont ensuite saluer l’Étendard avant que le Ministre ne passe les troupes en revue accompagné du CEMAT.

À 16 H 15, le cercueil, porté par les commandos, s’avance au centre du dispositif. Peu après son arrivée, M. MORIN, prononce le discours d’hommage de la Nation, reproduit ci-après, excellent sur le fond, la forme et le ton. Peu après, monsieur le Ministre dépose la croix de la Légion d’Honneur dans le grade d’officier sur le cercueil de CEN SONGZONI qui a été promu le jour de sa mort au combat.

Peu après, les derniers honneurs avant le départ du cercueil au son de la marche funèbre.

À la fin de la cérémonie, à l’invitation du chef de corps, le Ministre et les autorités rejoignent la famille du commandant SONZOGNI avant de se diriger vers la salle “Leguen” pour un entretien particulier.

À 17 H 00, le Ministre rejoint le régiment rassemblé dans le gymnase pour une adresse aux artilleurs parachutistes de quelques minutes.

Dés la fin de la cérémonie militaire, la famille et tous les amis civils et militaires les plus proches se sont rendus à la cathédrale de la Sède à Tarbes suivre l’office religieux présidé par Monseigneur LE GAL, évêque aux armées. Là encore, alors que le régiment était devant le Ministre, l’amicale était présente pour réserver les places à la famille, aux proches, aux anciens et aux membres du régiment. Lorsque nous sommes arrivés, une centaine de places étaient déjà occupées par des tarbais qui tenaient à s’associer au deuil du régiment et de la famille. Malheureusement, la cathédrale était trop petite pour accueillir tout le monde et il n’y eu que la BAI, l’ancienne batterie du capitaine SONZOGNI qui put rentrer pour ce dernier hommage œcuménique. Là encore, pendant une très belle messe, les amis, les voisins ont rendu hommage à l’ami SONZOGNI avant de clore par le chant de la Prière du Para lancé par la BAI et repris par tous anciens et jeunes parachutistes présents.

Ces deux célébrations ont très bien marqué l’épreuve douloureuse de la famille et du régiment et de tous ceux qui ont eu le bonheur de rencontrer un jour cet homme d’exception qui a marqué bon nombre d’entre nous par toutes ses qualités, physiques, morales, de rigueur, de courage, d’amitié, de sens de l’humain que l’on peut attendre d’un soldat, d’un subordonné et d’un chef. Cette épreuve douloureuse fût ressentie par tous au cours de ces deux cérémonies, peu d’entre nous n’ont pu retenir larmes ou sanglots et grande émotion.

Le CEN SONZOGNI est mort au combat, en soldat. Il restera pour tous l’exemple à suivre.

Il n’oubliait pas ses anciens comme l’a prouvé son dernier courrier adressé à l’amicale, alors, n’oublions pas sa mémoire et prêtons aussi beaucoup d’amitié à sa famille ainsi qu’à celle du BCH RODRIGUES, son conducteur, qui souffre et mérite toute notre attention.

 Le président Bernard Delaval



Éloge funèbre du chef d’escadron Patrice SONZOGNI prononcée le 17 février 2009 par Monsieur MORIN, Ministre de la Défense

 

Aujourd’hui c’est dans la douleur et la tristesse que nous sommes rassemblés.

Nous sommes rassemblés pour rendre un dernier hommage à l’un des nôtres, tombé au combat, au service de la France et de la Paix.

Tombé avec son interprète afghan, Mohamad Shafiq OMERKHAIL, auquel je veux associer notre recueillement. Tombé avec le Brigadier-chef Trevor RODRIGUES, aujourd’hui grièvement blessé, vers qui se tournent aussi nos pensées et notre soutien.

Je sais que pour vous, Madame SONZOGNI, sa mère, pour vous, Nathalie, son épouse, et vos deux filles Tatiana et Carla, pour vous ses proches, pour vous, ses camarades, l’épreuve est insupportable.

Je sais que les mots sont bien faibles à côté de votre souffrance et du sentiment d’injustice que vous devez éprouver.

Je sais que ces mots ne remplaceront jamais votre père, votre mari, votre fils ou votre ami.

Mais ces mots sont là pour vous dire que la France pleure avec vous, que la France est à vos côtés.

Nous sommes là pour vous dire que la France est fière de son fils et de ce qu’il a fait.

Chef d’escadron Patrice SONZOGNI, votre régiment, le 35, est rassemblé autour de vous. Dans ce quartier Soult où bat depuis 33 ans le cœur des artilleurs parachutistes, dans ce quartier Soult où tant de fois ont été célébrées leurs joies et leurs peines, dans ce quartier Soult que vous avez tant de fois quitté pour partir en opération, vos frères d’armes sont là avec vous.

Vous étiez l’officier le plus décoré du régiment.

Vous étiez l’une de ses plus belles figures.

Vous étiez sa fierté.

Votre disparition brutale est une épreuve pour tous les artilleurs parachutistes.

Mais elle n’affecte en rien leur détermination de soldats.

Nul doute qu’ils se souviendront souvent de vous, à l’heure ou ils seront au cœur de l’action.

Nul doute qu’ils se souviendront à quel point le risque et son acceptation font partie du métier des armes.

Votre mort nous rappelle tragiquement à tous que la défense a aussi un prix cruel, elle nous rappelle cruellement les risques liés au métier de soldat.

« Toute vocation est un appel », disait Bernanos.

Vous auriez pu faire votre cette phrase.

La vocation militaire, ce sont des droits et des devoirs.

C’est un désir de servir son pays autrement, pour les causes les plus grandes, par la voie des armes et par le commandement de jeunes Français issus de tous les milieux, de tous les horizons, souvent hors de la métropole.

C’est aussi le sens de l’effort et de la performance collective, porté à un haut degré d’exigence, l’abnégation et l’exemplarité, l’acceptation du danger et, si il le faut, du sacrifice de sa propre vie.

Voilà l’exemple que vous laissez, Chef d’escadron SONZOGNI, voilà ce que transmet votre parcours exceptionnel à vos frères d’armes, vous qui étiez souvent considéré comme le meilleur d’entre eux.

Chef d’escadron Patrice SONZOGNI,

Engagé comme sous-officier en 1983, vous choisissez le 35e RAP dès votre sortie d’école et lui restez fidèle en le servant pendant vingt-et-un ans. Vous êtes l’exemple même de ce que peut produire l’armée française : de ces hommes et ces femmes, sous-officiers ou militaires du rang qui, par l’effort, sont reconnus et peuvent accéder par leur mérite à des responsabilités toujours plus grandes.

Équipier commando parachutiste, vous gravissez tous les échelons avant d’être promu officier et de recevoir le commandement d’une batterie parachutiste.

Ce temps de commandement au 35 fut pour vous le couronnement d’une carrière exceptionnelle de chef militaire de contact, toute entière dédiée à l’action.

En 25 ans de carrière, vous avez été de toutes les opérations extérieures à votre actif.

Mais surtout, partout où vous avez été engagé, vous vous êtes montré un béret rouge exemplaire : en République Centrafricaine, au Tchad, au Congo, à Djibouti, en Bosnie, au Kosovo, en Macédoine, en Irak.

Constamment, votre rigueur, votre expérience et votre professionnalisme ont fait honneur à votre régiment, à la brigade parachutiste, à votre pays.

Chaque fois vous avez mené vos missions avec passion, avec une haute idée de votre engagement et de ce qu’il représente, pour la France et pour les Français.

Blessé lors de la première guerre du Golfe, vous aviez connu la souffrance physique du soldat, vous saviez ce qu’il peut en coûter de s’engager pour son pays.

Pour vos subordonnés et pour vos camarades, vous étiez l’expérience, vous étiez le charisme, vous étiez le courage, mais aussi la bienveillance.

Pour eux, avec un sourire entendu vous saviez obtenir tout ce dont ils avaient besoin.

Pour eux, vous étiez tous simplement un exemple.

Chef d’escadron Patrice SONZOGNI, le 23 novembre dernier, vous étiez déployé en Afghanistan avec vos camarades.

Là bas, vous formiez au sein d’une OMLT, l’armée nationale afghane afin que les Afghans puissent par eux même prendre leur destin en main et assurer leur sécurité.

C’est pour cela que nos missions dans les OMLT sont si majeures :

Pour qu’un jour nous puissions quitter ce théâtre avec le sentiment du devoir accompli.

Là bas, vous luttiez inlassablement pour que ceux qui nient nos valeurs ne connaissent pas le répit.

Là bas, vous luttiez pour la sécurité de notre pays et de nos concitoyens, ici en France. Vous saviez que si on ne combat pas là bas les terroristes, c’est chez nous qu’un jour se produiront des tragédies, c’est chez nous qu’ils commettront leurs carnages.

Là bas, enfin, au côté de nos alliés afghans et au sein de la coalition, vous avez œuvré au service d’une cause juste qui fonde notre identité : celle de la liberté, des droits de l’Homme, de la dignité de la femme, de la démocratie.

Chef d’escadron Patrice SONZOGNI, vous aviez choisi de servir la France.

Vous avez rejoint tous ceux qui, ayant fait ce même choix du métier des armes, sont allés jusqu’au bout de leur mission. Que Sainte Barbe et Saint Michel veillent dorénavant sur vous.

L’armée de Terre et toute la Défense m’accompagnent aujourd’hui pour saluer solennellement, une dernière fois votre mémoire et votre courage.

Au nom de la Nation, et avant de vous remettre la croix d’officier de la Légion d’Honneur, je m’incline devant votre bravoure.

L’exemple que vous nous laissez ne sera jamais oublié, il nous conduit aujourd’hui encore, comme le demande la belle devise de votre régiment, à aller « Droit Devant ».